
Le métier de vétérinaire, souvent rêvé et admiré, traverse une crise profonde. En France, le manque de vétérinaires, particulièrement en zones rurales, a atteint des niveaux alarmants. Cette pénurie a des conséquences graves : elle affecte la santé animale, le bien-être des propriétaires, et la sécurité sanitaire globale, notamment face aux zoonoses. Pourtant, le marché, notamment pour les animaux de compagnie, est en pleine croissance. Comment expliquer cette pénurie et, surtout, comment y remédier ?
Un constat alarmant sur la profession de vétérinaire : une pénurie qui impacte notamment les territoires ruraux
La France souffre d’un déficit estimé entre 800 et 1 000 vétérinaires en 2023, selon les chiffres rapportés. Ce manque est particulièrement visible dans les zones rurales, où seulement 0,29 vétérinaire est disponible pour 1 000 habitants, bien en dessous de la moyenne européenne de 0,42.
Ce phénomène de « désertification vétérinaire » a des répercussions multiples. Les éleveurs, essentiels à l’économie agricole française, peinent à trouver des professionnels disponibles pour soigner leurs animaux. Les retards dans les interventions peuvent entraîner des pertes économiques importantes et des risques sanitaires majeurs.
De leur côté, les propriétaires d’animaux domestiques en zones rurales doivent parcourir de longues distances pour consulter un vétérinaire, compliquant l’accès aux soins préventifs ou urgents. À cela s’ajoute l’impact sur la santé publique : en effet, la lutte contre les zoonoses, qui représentent 60 % des maladies infectieuses humaines, repose en partie sur la surveillance et les actions des vétérinaires.
Vétérinaire : un métier difficile d’accès et une réalité professionnelle éprouvante
La pénurie de vétérinaires s’explique aussi par des freins structurels. Tout d’abord, l’accès à la profession est limité. Bien que la capacité des écoles vétérinaires ait augmenté ces dernières années, elle reste insuffisante face à la demande croissante. Les étudiants se tournent souvent vers des formations à l’étranger, en Espagne ou en Roumanie, pour contourner le numerus clausus français. En 2020, plus de 50 % des nouveaux diplômés en France avaient été formés dans d’autres pays de l’Union européenne.
Mais le problème ne s’arrête pas à la formation. La réalité du terrain s’avère souvent éloignée des attentes des jeunes diplômés. Jusqu’à 20 % des vétérinaires n’exercent jamais en clientèle, et 15 % abandonnent le métier au bout de cinq à dix ans.
Le quotidien des vétérinaires peut être éprouvant : longues journées, astreintes fréquentes, et la nécessité de concilier empathie, gestion des clients, et contraintes économiques.
Cette difficulté à équilibrer vie privée et vie professionnelle est particulièrement visible chez les nouvelles générations. Ces jeunes professionnels refusent de travailler 315 jours par an, comme c’était souvent le cas auparavant, et privilégient des conditions de travail plus flexibles et respectueuses de leur bien-être.
Des initiatives pour répondre à la pénurie de vétérinaires
Face à cette situation critique, plusieurs solutions, qu’elles relèvent d’initiatives publiques ou du milieu professionnel lui-même, ont vu le jour :
De nouveaux modèles de travail :
De plus en plus, les professionnels et cliniques se regroupent pour optimiser leur fonctionnement et pour offrir des conditions plus attractives, comme des horaires aménagés ou une rémunération plus élevée. Ces structures permettent également un meilleur partage des responsabilités administratives. C’est le cas par exemple pour le réseau de cliniques vétérinaires Mon Véto ou Univert.
Renforcer le réseau vétérinaire rural
Des plans gouvernementaux, comme celui lancé en Corrèze, visent à soutenir l’installation en milieu rural. Aides à l’installation, bourses, subventions au transport ou au logement sont autant de mesures incitatives.
Augmenter les capacités de formation
Les écoles vétérinaires publiques ont accru leurs promotions, tandis que des écoles privées, comme UniLaSalle à Rouen, ont été créées pour accueillir davantage d’étudiants. Grâce à ces efforts, le nombre de diplômés devrait augmenter de 75 % entre 2017 et 2030.
Réformer les études et adapter la profession :
Le recrutement post-bac, basé sur des entretiens et des critères de savoir-être, permet d’attirer des profils diversifiés. En parallèle, les formations incluent désormais des modules de gestion, de marketing et de communication, pour préparer les vétérinaires à mieux concilier leur rôle médical et les responsabilités entrepreneuriales.
La pénurie de vétérinaires, particulièrement en zones rurales, met en lumière des défis à la fois structurels et sociétaux. Si les mesures engagées, comme l’augmentation des capacités de formation et les incitations pour le milieu rural, sont encourageantes, elles nécessitent un suivi rigoureux pour garantir leur efficacité. La profession vétérinaire doit également continuer à évoluer pour s’adapter aux réalités actuelles, qu’il s’agisse des conditions de travail ou des attentes des jeunes générations. Le succès de ces transformations dépendra de la capacité des différents acteurs à collaborer et à innover pour redonner au métier sa pleine attractivité.